Un semblant d'entraînement

C’était par un bel après-midi ensoleillé, juste après un copieux repas, que Selaryel cru bon pour sa santé de s’exercer au tire à l’arc, pour lequel il avait pris goût dès le plus jeune âge. Il décida alors que le meilleur endroit pour pratiquer ce sport serait la forêt, où il pourrait tirer sur des arbres sans risquer la vie de qui que ce soit.

L’éclairage, adouci par les arbres, redoublait de beauté la forêt et procurait une atmosphère de repos à celle-ci. Malheureusement, cela ne pouvait qu’encourager le jeune homme à profiter de la tranquillité de la forêt et ainsi, ne pas pratiquer son tire.

Selaryel essaya de ne pas succomber à la tentation ( mais délivre-nous du mal Amen ) et prit l’artillerie nécessaire à son entraînement. Il fit d’abord une petite marque sur un tronc d’arbre en face de lui et s’en éloigna à un point où elle était à peine visible. Il plaça lentement la flèche, ferma un œil et, avec la pointe de sa flèche, visa ce qui semblait être la marque qu’il avait fait. Il lâcha la pièce et la corde se détendit pour propulser l’objet en direction de la cible.

À sa grande déception, Selaryel n’atteignit pas son objectif et manqua la marque par un seul petit centimètre. Il alla décrocher la flèche et vit sa faute.

- Crotte… Je n’étais peut-être pas assez reposé pour bien viser. Oui, ce doit être ça. Je vais aller m’asseoir à rien faire pour regagner l’énergie que j ‘ai dépensé à manger.

C’est ainsi, qu’avec l’accord de son dedans, que le jeune Sénateur écouta son bon conseil et s’assit au pied de l’arbre à ne rien faire en attendant que quelque chose se produise.

C'est au moment où la flèche rata sa cible qu'un corbeau blanc aperçut le jeune sénateur. L'oiseau était accompagné d'un autre corbeau, noir cette fois. C'était une des rares promenades qu'Anië se permettait avec son ami. Elle avait décidé de profiter de cet après-midi calme et ensoleillé pour quitter son royaume.

En ce moment, l'Aervallie était assez tranquille, la sénatrice pouvait donc se permettre de la quitter de temps en temps. Car bien qu'elle aime beaucoup ces contrées, elle appréciait également de voir d'autres paysages que ceux des hautes montagnes entourant son château.

A l'instant, elle avait décidé de se poser au sol, ses ailes devenant un peu plus lourdes à chaque battement. Et une fois posée sur une branche basse d'un grand hêtre, elle avait aperçu l'archer déçu de sa performance. Elle l'observa qui venait s'allonger contre le tronc de son arbre et remarqua la petite cible dessinée dessus. L'homme semblait plutôt jeune, mais elle avait l'impression de l'avoir déjà vu quelque part.

Il faut dire que sa vision n'était pas toujours la même quand elle était sous sa forme animale. Pendant qu'elle se demandait où elle l'avait déjà vu, le corbeau noir la rejoignit en la regardant d'un air enjoleur. Il désirait sans doute retourner dans le ciel avec elle, mais Anië préférait économiser ses forces.

Le jeune homme en bas de l'arbre l'intriguait, mais elle n'avait pas envie de déranger le repos de celui-ci, c'est pourquoi elle ne descendit pas et resta perchée sur sa branche, discutant (ou plutôt croassant) joyeusement avec son ami.

Alors que notre ami était probablement sur le point de peut-être avoir dans l'idée de faire, éventuellement, une sieste, de joyeux croassements vint le déranger. Trop lâche pour se donner la peine d'ouvrir les yeux, il laissa faire les deux corbeaux et se dit qu'ils allaient sûrement partir. Il n'allait tout de même gaspiller plus d'énergie plus qu'il ne l'avait déjà fait. Il était épuisé, le pauvre, et avait le grand besoin de se reposer. Enfin, c'est ce qu'il croit être bon.

Malheureusement pour le jeune sénateur du pays des neiges éternelles, chose ne fut pas comme il l'avait entreprise et les corbeaux continuèrent de s'adonner à leur passionnante conversation.

Cet ainsi que, par un miracle des déesses de la lune et du soleil, Selaryel ouvrit UN oeil et repéra les ''dérangeux-de-paresseux''. Puis, sûrement encore l’œuvre de nos bonnes déesses, il étira son bras vers les fauteurs de trouble, mais sans succès. Il était trop loin pour les atteindre. Après tout, il devait y avoir un bon pied entre l'extrémité de sa main et des volatils.

Le troisième plan, pour remédier à ce problème, avait un taux de réussite fort plus encourageant, était simple et peut-être même moins exigeant que les deux dernières tentatives. Il prit une petite pierre non-lui de lui et, avec son visé de la mort qui tue, la lança sur la tête d'un des deux corbeau, en espérant les faire fuir, ou du moins, de les faire taire.

Anië n'avait pas pensé que sa vive discussion avec Velradh, son corbeau noir, puisse déranger le jeune homme endormi plus bas, bien au contraire! Quand celui-ci leva le bras, comme pour atteindre les deux oiseaux, la jeune sénatrice avait cru qu'il bougeait dans son sommeil. Après tout, qu'y avait-il d'étrange à cela?

Simplement, elle avait tourné la tête et avait écouté ce que disait Velradh sur la manière la plus adéquate de manger des asticots. Dégoûtée, elle lui avait répondu qu'elle ressemblait peut-être à un corbeau, mais qu'elle n'en était pas moins une femme humaine qui ne mangeait pas d'asticot pour son petit déjeuner.

Et voilà que l'oiseau noir avait été pris d'un fou rire incontrôlable, ce qui ne plu apparemment pas à l'homme endormi au pied de l'arbre. Anië, qui avait cru jusque là qu'il s'était assoupi, poussa un cri rauque paniqué en apercevant une pierre foncer vers sa tête à toute allure. Velradh réagit au quart de tour et bouscula son amie pour recevoir la pierre en plein bec.

Les yeux du corbeau blanc se dilatèrent d'horreur tandis que l'autre tombait à la renverse et chutait sur un tas de feuilles mortes. Anië s'envola jusqu'à lui, mais sa forme animale ne lui permettant pas de s'assurer que son ami aille bien, elle reprit sa forme d'origine. Maintenant qu'elle avait des mains, elle put prendre l'oiseau et le soigner. Elle fit passer un peu de magie entre ses doigts, et un léger flot de lumière vint guérir le bec écrasé du blessé.

Une minute plus tard, la jeune femme était tournée vers le jeune homme, qu'elle reconnût tout de suite. C'était le sénateur d'Alkareth. Elle ne se priva pas pour lui crier toutes sortes de choses du style:

"C'est ainsi que vous traitez les pauvres animaux sans défense? On peut savoir ce qu'on vous a fait pour que vous vous permettiez de nous assommer avec des pierres?"

Et elle cria ainsi pendant deux bonnes minutes, jusqu'à ce qu'elle n'ait plus de souffle. Quand elle s'arrêta enfin, elle se rendit compte de ce qu'elle faisait et se calma instantanément. Une personne comme elle ne devait pas perdre son sang-froid, peu importe la situation. Elle ne s'excusa tout de même pas pour son comportement, et attendit visiblement des excuses de la part du sénateur.

{hj: J'ai pas balancé une arme meurtrière de la mort qui tue, j'ai dit que j'ai lancé une petite pierre avec mon VISÉ de la mort qui tue en voulant dire que c'était précis, pas mortel!}

Selaryel arqua un sourcil à la vue de cette cène tragique et à la réaction presque hystérique de mademoiselle la sénatrice d’Aervallie. Enfer et damnation, si ce malheureux corbeau ne pouvait même pas contenir la charge de cette petite roche, qu’il ne se promène pas dans une forêt remplie de dangers potentiels! Peut-être que notre ami avait sous-estimé sa force? «Tout porte à croire que j’ai une force titanesque que je devrai apprendre à contrôler» se dit-il intérieurement, d’un air amusé. Peu importe, le mal était fait, il avait blessé un animal et il devait, sans doute, s’en excuser. Il ne tenait pas à se disputer avec une jeune sénatrice, en partie dû à sa fatigue et sa lâcheté.

-Désolé. Dit-il calmement.

Pas de bol aujourd’hui, pensait-il, tous ces cris l’avaient réveillé. Il ne pouvait plus se rendormir. Il pensa bon de poursuivre la «conversation».

-Rassurez-vous madame, vous ne m’avez rien fait pour que je me permette de vous assommer avec des pierres, je l’ai fait de mon plein gré, c’est d’ailleurs mon passe-temps favoris. Dit-il a sarcastiquement.

Il laissa échapper un rire discret et changea de sujet rapidement, de peur que la jeune femme ait une autre envie soudaine de lui défoncer les tympans.

-Vous êtes bien jeune pour être une sénatrice. Vous me semblez à peine plus vieille que moi. Je n’ai pas beaucoup entendu parler d’Aervallie. La région d’Alkareth, en contre partie, avait fait connaître son nom par le prédécesseur de Saleryel, son père, un des plus cruels sénateur de l’empire tout entier. Je me demande ce qui a bien pu se passer pour qu’une si jeune personne soit mise au pouvoir.

«Elle a le visage d'une jeune adolescente» Songea-t-il

Oui, lui aussi était jeune, mais il avait ses raisons. Il n’avait pas vraiment envie d’être sénateur lui-même, mais ses frères étaient bien trop jeunes pour gouverner et puis, il avait reçu l’éducation adéquate, mais ses cadets, non. Se rappelant de son titre, il poursuivit ses paroles pour tenter de se rapprocher d’Anië, pour des raisons purement politiques. S'il y a bien une chose que Selaryel ne voulait pas, c'était de se faire des ennemis. Bien sûr, il n’avait certainement rien arrangé avec sa remarque sarcastique de tout à l’heure et la réputation de son paternel ne pouvait que lui nuire autant. On avait tendance à croire que la cruauté de son père lui avait été transmis. Il n'avait guère besoin de tels préjugés.

-Bref, il est honteux que ma première rencontre avec votre personne se fasse dans de telles circonstances. Étant sénatrice vous-même, je crois que vous comprendrez que je ne souhaite nullement me faire dévaloir auprès de vous. Je suis tout à fait sincère quand je vous dis que je ne souhaitais en aucun cas faire du mal à votre ami.

Il se défit de son bouclier et de son épée ne les déposants plus loin, se leva et s’accroupit près des deux personnages, en profitant de l’occasion pour l’état dans lequel se trouvait l’oiseau.

(Hj: J'avais compris, mais désolée si ça t'a semblé exagéré.)

Anië était parfois un peu trop implsive, mais son ami était fragile et elle n'acceptait pas facilement qu'on le blesse. Inspirant un grand coup, elle força sa respiration à se calmer. Elle en faisait trop. Elle n'avait jamais rencontré en personne le sénateur d'Alkareth, mais elle l'avait reconnu tout de suite, car il ressemblait à son père.

Elle n'apprécia pas du tout la remarque sarcastique de Selaryel, mais elle ne répondit rien. Il n'était pas digne d'elle de répliquer. D'ailleurs, le sénateur lui avait clairement fait ses excuses, l'affaire était donc close. Anië détourna le regard quelques instants et le posa sur Velradh qui commençait à aller mieux. Rassurée, elle regarda à nouveau le jeune homme.

Elle ne s'étonna pas quand il lui dit qu'il ne connaissait pas beaucoup l'Aervallie. Son royaume avait toujours été calme et discret. Par contre, celui de Selaryel était réputé pour avoir eu pendant des années un sénateur cruel et sans pitié.
Elle décida d'expliquer en quelques mots pourquoi elle était devenue sénatrice. En fait, elle y avait été contrainte, mais elle avait toujours pris ses responsabilités.

"C'est très simple, mon père est mort. J'ai donc hérité du poste, vu que je suis l'aînée de ses filles et qu'il n'avait pas de fils."

Elle n'était pas sénatrice depuis très longtemps, mais elle n'était pas naïve. Le jeune sénateur ne voulait certainement pas avoir de mauvaises relations avec l'Aervallie, c'est pourquoi il s'excusait aussi docilement. Mais cela étant également valable pour elle, elle ne protesta pas.

"Bien. Je pense que vous êtes sincère, vous êtes donc pardonné. Mais je me vois désolée à mon tour pour ma réaction trop impulsive. Veuillez donc considérer que nous sommes quittes."

Elle se força à sourire. Jusque là, le sénateur s'était montré très poli, et elle espérait qu'il ne tenait pas trop de son père. Celui-ci avait toujours été un grand manipulateur, il avait été très bien connu pour ça. Anië dit d'une voix maintenant beaucoup plus douce et calme, comme elle l'était habituellement;

"Maintenant, reprenez vos armes et relevez-vous. Nous sommes égaux vous et moi, et de part nos statuts, je me plais à espérer que dorénavant, nous entretiendrons de bonnes relations."

Heureusement qu'elle le pensait, se dit-elle. Elle n'aimait pas non plus se faire des ennemis, car la guerre n'était pas faite pour elle. Ce qui ne l'avait pas empêchée d'avoir quelques différents avec le royaume du Syltarien.